Parentalité et violences éducatives ordinaires (VEO) : comprendre pour changer
Parentalité
Par : Parentela

Temps de lecture : 2min
Être parent est sans doute l'une des expériences les plus enrichissantes et bouleversantes de la vie. Nous aspirons à offrir à nos enfants un cadre d'amour et de sécurité pour qu'ils puissent grandir sereinement. Pourtant, dans notre quête pour bien faire, nous pouvons, sans même nous en rendre compte, adopter des comportements qui relèvent des violences éducatives ordinaires (VEO). Ces pratiques, souvent banalisées, peuvent avoir des impacts significatifs sur le développement émotionnel et psychologique de nos enfants.
Qu'est-ce que les violences éducatives ordinaires (VEO) ?
Les violences éducatives ordinaires regroupent un ensemble de pratiques que de nombreux parents utilisent par habitude ou parce qu'ils les ont eux-mêmes subies dans leur propre enfance. Ce sont des gestes ou paroles que l'on considère souvent comme anodins ou même nécessaires pour éduquer un enfant. Cependant, ces actions, bien que perçues comme inoffensives, peuvent affecter la manière dont l'enfant se construit et perçoit le monde.
Exemples concrets de VEO
Les VEO peuvent se manifester sous différentes formes, parfois subtiles, parfois plus évidentes. Voici quelques exemples qui peuvent nous surprendre par leur fréquence dans notre quotidien :
- Les menaces et les ultimatums : Par exemple, dire à un enfant "Si tu ne manges pas ton assiette, tu seras privé de dessert" ou "Si tu continues à pleurer, je vais te laisser seul dans ta chambre". Ces phrases visent à obtenir une obéissance immédiate en jouant sur la peur de la perte ou de la punition.
- Les humiliations verbales : Lorsqu'on dit à un enfant "Tu es vraiment bête !" ou "Tu n'arriveras jamais à rien si tu continues comme ça", on porte atteinte à son estime de soi. Ce genre de propos, s'ils sont répétés peuvent laisser des traces et conditionner la perception que l’enfant et le futur adulte aura de lui-même.
- Les fessées ou tapes sur les mains : Souvent utilisées pour "corriger" un comportement, ces pratiques sont encore largement répandues. Elles enseignent à l'enfant que la violence est une réponse acceptable à un conflit ou à une désobéissance. L’enfant et le futur adulte aura tendance à réutiliser la violence pour gérer les situations qui se présentent à lui.
- Les comparaisons dévalorisantes : Dire "Regarde ton frère, lui, il est sage" ou "Pourquoi tu n'es pas aussi calme que ta sœur ?" peut amener l'enfant à se sentir incomplet ou moins aimé.
- Les chantages affectifs : Des phrases comme "Si tu continues à faire des bêtises, maman ne t'aimera plus" ou "Papa est triste à cause de toi" sont des manipulations émotionnelles qui pèsent lourd sur l'enfant, qui se sent alors responsable du bien-être de ses parents.
- L'isolement forcé : Envoyer un enfant se calmer seul dans sa chambre après une crise, sans explication ou accompagnement, peut lui faire croire que ses émotions sont mauvaises ou qu'il est seul pour les gérer.
Ces exemples montrent que les VEO ne se limitent pas à des actes de violence physique flagrante. Elles englobent aussi des comportements verbaux et psychologiques qui, à long terme, peuvent être tout aussi délétères pour l'enfant.
Comprendre les impacts des VEO
Les violences éducatives ordinaires, qu'elles soient physiques ou psychologiques, affectent l'enfant à différents niveaux. Un enfant qui subit régulièrement des VEO apprend à craindre l'autorité, plutôt qu'à la respecter. Ce mode d'éducation, fondé sur la peur, peut freiner son développement émotionnel et social.
Impact psychologique
Sur le plan psychologique, les enfants victimes de VEO sont souvent plus enclins à développer des troubles anxieux ou dépressifs. Ils peuvent aussi montrer des signes d'insécurité affective, de manque de confiance en soi, et d'agressivité. L'enfant internalise l'idée qu'il doit mériter l'amour de ses parents, conditionné par son comportement. Cette vision conditionnelle de l'amour parental peut engendrer un sentiment de culpabilité ou de honte lorsque l'enfant n'arrive pas à répondre aux attentes parentales.
Impact relationnel
Sur le plan relationnel, ces enfants peuvent avoir du mal à développer des relations saines et équilibrées avec les autres. Ils peuvent reproduire les schémas violents qu'ils ont intégrés, à la fois dans leurs relations amicales, amoureuses ou professionnelles futures et dans leur propre parentalité. En effet, les enfants qui ont grandi dans un environnement marqué par les VEO sont plus susceptibles de reproduire ces comportements avec leurs propres enfants, perpétuant ainsi un cycle de violence.
La théorie de l'attachement et les VEO
La théorie de l'attachement, développée par John Bowlby, est essentielle pour comprendre comment les VEO influencent le développement de l'enfant. Selon cette théorie, l'attachement est un lien émotionnel profond entre un enfant et ses figures parentales, qui influence sa capacité à former des relations sécurisantes tout au long de sa vie.
Attachement sécurisant VS attachement anxieux
Un attachement sécurisant se développe lorsque les parents répondent de manière sensible et cohérente aux besoins émotionnels de l'enfant. Cet enfant apprend à faire confiance aux autres, à se sentir en sécurité et à explorer le monde avec assurance.
En revanche, un attachement anxieux peut se développer en réponse aux VEO. Lorsqu'un enfant est confronté à des menaces, des humiliations ou des chantages affectifs fréquents, il peut développer des comportements de recherche constante de réassurance ou de repli sur soi. Il peut aussi montrer une grande anxiété dans ses relations futures, cherchant à éviter le rejet ou à se conformer aux attentes des autres pour obtenir de l'affection.
Changer de vision : L'enfant au centre de l'éducation
Il est essentiel de repenser notre approche éducative en mettant l'enfant au centre. Cela signifie reconnaître l'enfant comme un être en construction, sensible et digne de respect. Loin des idées reçues, il est prouvé qu'une éducation fondée sur l'empathie et le respect favorise un développement plus harmonieux de l'enfant.
Reconnaître les liens avec notre propre vécu
Nous portons tous en nous l'empreinte de notre propre enfance. Il est courant de reproduire inconsciemment les schémas éducatifs que nous avons connus. Pourtant, il est possible de s'en libérer en prenant conscience de ces mécanismes. Reconnaître l'impact de notre passé sur notre parentalité actuelle est le premier pas pour changer de cap.
Prendre le temps de réfléchir à notre propre vécu, aux émotions que nous avons ressenties en tant qu'enfant, peut nous aider à mieux comprendre pourquoi nous agissons de telle ou telle manière avec nos propres enfants. Le travail sur soi est essentiel pour défaire les nœuds du passé et éviter de les transmettre à la génération suivante s’il y a lieu.
Comment modifier son style éducatif sans pression ?
Changer de style éducatif peut sembler difficile, surtout lorsque nous sommes pris dans la routine quotidienne. Il est important de se rappeler que nous ne pouvons pas être des parents parfaits. Ce qui compte, c'est d'être conscients de nos actions et de chercher à faire de notre mieux. Voici quelques conseils à adapter à vous :
- Accepter ses erreurs : Aucun parent n'est parfait, et il est normal de faire des erreurs. L'important est de les reconnaître, de s'excuser si nécessaire, et d'apprendre pour mieux agir à l'avenir.
- Prendre du recul : Lorsqu'une situation devient tendue, il est utile de prendre quelques minutes pour respirer et réfléchir avant de réagir. Cela permet de répondre de manière plus calme et réfléchie.
- Privilégier l'écoute active : Essayer de comprendre ce que l'enfant ressent et pourquoi il agit ainsi. Une approche empathique permet souvent de désamorcer les conflits.
- S’informer.: Il existe de nombreux livres et supports sur l'éducation. Des ouvrages comme Vivre heureux avec son enfant de Catherine Gueguen ou J'ai tout essayé ! d'Isabelle Filliozat offrent des pistes concrètes pour modifier son approche éducative.
- Se faire accompagner : Si vous ressentez le besoin d'un soutien, n'hésitez pas à consulter un psychologue, un éducateur spécialisé, ou un coach parental. Ces professionnels peuvent vous aider à explorer vos propres mécanismes et à adopter des stratégies plus bienveillantes.
Vers une parentalité libérée de la violence
En choisissant de renoncer aux violences éducatives ordinaires, nous offrons à nos enfants un cadre où ils peuvent s'épanouir pleinement. Une parentalité sans VEO, c'est leur donner les moyens de se développer dans un environnement basé sur la confiance, le respect, et l'amour inconditionnel.
Nous ne sommes pas parfaits, et ce n'est pas grave. L'essentiel est de faire de notre mieux, en étant conscients de nos actes. Chaque pas vers une éducation plus bienveillante est une victoire, pour nous comme pour nos enfants.
Références et ressources conseillées
- "Vivre heureux avec son enfant" de Catherine Gueguen.
- "L’attachement : a secure base" de John Bowlby.
- "C'est pour ton bien : racines de la violence dans l'éducation de l'enfant" de Alice Miller et Aubier.
- "Petit livre - décodeur des violences éducatives ordinaires" de Céline Quelen.

À retenir de l’article
Nous pouvons, sans même nous en rendre compte, adopter des comportements qui relèvent des violences éducatives ordinaires (VEO). Ces pratiques, souvent banalisées, peuvent avoir des impacts significatifs sur le développement émotionnel et psychologique de nos enfants. S'informer, c'est un premier pas pour éviter les VEO.